Stop Covid : l’application qui fait débat

On s’approche de plus en plus du 11 mai, la date supposée du déconfinement, mais cette date n’annonce en rien la fin de la pandémie, seulement la reprise de plusieurs activités qui ont été mises en pause depuis le début du confinement. Durant cette période, le virus continuera de sévir. Face à cette menace, la technologie se positionne comme un excellent moyen de contrôler la propagation du virus, mais son application reste très compliquée, car elle permet un contrôle qui prend rapidement les pas sur les libertés de chacun.
L’application Stop Covid prévue par le gouvernement pour lutter contre le coronavirus en est l’exemple parfait, car elle est en plein dans ce dilemme entre contrôle et liberté. L’objectif ici, ne va pas être de remettre en cause l’initiative, mais de vous expliquer sur quoi elle repose, et pourquoi elle fait autant débat.
Comment ça marche ?
Imaginons une ville dans laquelle tout le monde possède l’application. L’application va enregistrer des « interactions » avec toutes les personnes qui auront été à une certaine distance, l’une de l’autre, et cela, pendant un certain temps. De ce fait, lorsqu’un cas de coronavirus aura été repéré, il sera possible de remonter vers chacune des personnes ayant été suffisamment en contact avec cette personne pour être contaminé. C’est une excellente méthode qui permet de repérer rapidement les porteurs du virus et d’éviter la création de nouveaux foyers.
Cependant, cette application fait débat. Dans un premier lieu, parce que son efficacité dépend du nombre de personnes qui vont télécharger l’application et aussi, parce qu’elle pose d’énormes questions sur le respect des libertés fondamentales de chacun.
Une telle application, peut-elle réellement fonctionner ?
L’installation de l’application
Cette application fonctionne grâce à un principe de communauté. C’est-à-dire que, c’est les gens qui font vivre l’application. Plus il y a de gens qui l’utilisent, plus l’application sera performante. Pour qu’elle soit 100% efficace, il faudrait que 100% de la population française l’installe. Vous imaginez bien que cela n’est pas possible. Selon une étude menée par Oxford, 60% de la population, c’est un minimum pour que l’application soit efficace. Mais même là, c’est compliqué. Il est bien évidemment totalement exclu d’obliger la population à installer l’application, car ce serait une forte atteinte aux libertés fondamentales. Il est aussi exclu d’empêcher les gens de sortir s’ils n’ont pas téléchargé l’application.
Pour la mise en place de cette application, l’État mise sur l’installation volontaire. C’est-à-dire que l’application sera utilisée par ceux qui voudront l’utiliser. C’est un pari risqué, car il existe un gros frein à l’installation de cette application : le respect de la vie privée.
Il y a aussi la question de l’équipement. Le coronavirus est spécialement dangereux pour les personnes âgées or, ce sont les personnes les moins susceptibles d’être équipés de smartphone.
Qu’en est-il des données personnelles ?
C’est le grand débat. Comme on l’a dit, l’application enregistre toutes les « interactions » que vous avez eues durant une journée et va donc emmagasiner un grand nombre de données personnelles vous concernant. Se posent alors des questions sur
- Le stockage des données : où sont-elles stockées ? Pendant combien de temps ? Et si je désinstalle l’application, que deviennent mes données ?
- La sécurité des données : comment sont protégées mes données ?
- La confidentialité des données : qui a accès à ces données ?
- L’anonymisation des données
Autant de questions qui sont susceptibles de freiner les utilisateurs potentiels. Plusieurs mesures ont été prises pour assurer une cohérence avec les libertés fondamentales comme le choix du Bluetooth par rapport à un système de traçage GPS où aux antennes-relais parce qu’il permet un traçage anonyme. Mais la mise en place de cette application va être compliquée, car elle touche à un sujet très sensible. Apple par exemple n’acceptera pas l’application sur son store à cause des tâches effectuées même lorsque l’utilisateur n’est pas sur l’application. Cela diminue encore plus le potentiel d’utilisateurs de l’application.
Au-delà de la gestion de crise, un enjeu politique
L’application Stop Covid pose surtout des problèmes politiques, car on pense surtout à l’après-crise. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a par exemple donné son accord pour mettre en place cette application, tout en mettant en garde l’État sur le risque de créer un effet de banalisation des systèmes de pistage. Le gros enjeu ici, c’est, est ce que cette application et les données qu’elle récolte seront totalement supprimées ou non à la fin de la crise, ou non.
Voilà donc une application qui n’a pas fini de faire parler d’elle.